Sunday 21 February 2016

5 fausses idées sur les fusillades propagées par Hollywood I

Tout le monde sait que les films d’action ne sont pas la réalité, mais ça ne change pas le fait qu’ils sont responsables d’à peu près 100% de notre éducation en termes d’armes et de combat. C’est pourquoi la connaissance du quidam moyen de ces chose-là est risible, et parfois fausse au point de pouvoir causer la mort.

Pour trier les faits et la fiction, nous avons interviewé deux vétérans décorés qui ont également fait l’expérience de travailler avec Hollywood. Matt Wagner est un ex-ranger de l’armée qui a vu des conflits à travers le monde, y compris l’Afrique, l’Amérique du Sud, et l’Afghanistan, puis a été conseiller technique pour nombre de productions hollywoodiennes, dont Stargate SG-1 et The Colt. « Jerry » était dans les forces armées privées et dans la sécurité et a travaillé en Amérique Centrale et du Sud et a été un temps cascadeur et chorégraphe de scènes de combat. Ils nous ont dit…

 

# 5 Les armes automatiques sont utiles, mais pénibles à souhait



Les mitraillettes dans les films transforment n’importe qui en ‘armée-d’un-homme’ – collez en une dans les mains d’un protagoniste et des escouades entières de soldats entraînés seront fauchées comme autant de mauvaises herbes.


Tenir un M60 sur les hanches est un bon moyen de pulvériser les calculs rénaux


En réalité, si vous faites ça plus de deux minutes votre fusil explosera.

Un de nos vétérans les plus expérimentés, Jerry, dit que ça s’appelle un « fusil en fuite. » Chaque fois qu’un fusil – n’importe quel fusil – tire, le canon chauffe un peu. Après tout, une balle est éjectée par une explosion miniature, et cela crée une friction de métal sur du métal tout le long du canon. Si vous faites passer un grand nombre de balles à travers ce canon d’affilée sans lui donner le temps de se refroidir, le fusil va littéralement chauffer à blanc.

Suffisamment chaud, en fait, qu’il va finir par brûler spontanément (ou « cuir ») les balles sans que vous ayez besoin d’appuyer sur la gâchette. Félicitations, vous avez maintenant entre les mains une mitraillette possédée qui va lâcher ses balles de manière aléatoire, d’elle-même, ce qui est assez pour que le plus endurci des membres des Expendables fasse dans son froc.

http://www.youtube.com/watch?v=fO18uWPcnko

Imaginez maintenant que l’événement décrit ci-dessus arrive quand, disons, vous courez ou venez de monter dans un véhicule, ou n’importe quelle autre situation où vous ne voulez absolument user de votre fusil à ce moment précis (la vie est pleine de ce genre de situations, quand on y pense). Et c’est le meilleur scénario – quand les munitions cuisent, les choses peuvent devenir explosives au point d’être inconfortables pour l’homme se tenant derrière ce fusil :

http://www.youtube.com/watch?v=seZZoddtlH8

Ouaih, notez que cela arrive quand votre visage est pressé contre le fusil. C’est pourquoi, dans la vraie vie, ces armes fragiles et caractérielles doivent être utilisées en parfaite coordination – non seulement un homme avec une mitraillette n’est-il pas une armée-d’un-homme, il n’a littéralement pas le droit de l’être – le manuel du corps des Marines, dans l’une des premières règles sur l’utilisation des mitraillettes, lit : « Aucune mitraillette ne devrait utilisée seule. » Il y a plusieurs raisons à cela, mais la seconde partie non verbale de cette phrase pourrait bien être : « à moins que vous ne vouliez foutre le feu à votre visage. »

Comme le dit Matt, notre ex-Ranger : « Utiliser les mitraillettes est une science. Mettons que vous en ayez trois dans votre escouade. Ils ne sélectionnent pas juste des cibles puis se mettent à tirer – et ils ne tirent certainement pas au hasard. Ils tirent en faisant partir d’une unité. Le 1er fusil tire quelques balles, puis le 2nd prend le relai, puis le 3ème, et de retour au 1er. On appelle ça ‘parler’. »


Hey, les gars, sortez un peu qu'on puisse 'parler'.


Ouaih, c’est la quantité d’efforts nécessaires pour s’assurer qu’aucune des mitraillettes ne se met à fondre. Matt dit que si, mettons, vous avez une escouade qui charge un immeuble plein de méchants, au début toutes les mitraillettes se lanceront en automatique juste assez longtemps pour que tout le monde de l’autre côté se mette à couvert. C’est exact – l’utilisation n°1 de ces armes à ce niveau est de tirer parti du fait qu’elles foutent la trouille. Puis elles ‘parlent’ tout au long de l’échange de coups de feu avec de courtes séquences pendant que le reste de l’équipe progresse et font ce qu’ils ont à faire. Ensuite, si les choses dégénèrent et que tout le monde doit se replier, c’est là que les mitraillettes repartent en mode automatique pour couvrir la manœuvre – c’est juste une pluie de balles destinée à jouer le rôle des bombes de fumée des ninjas.

 

# 4 Tout le monde est sourd durant un échange de coups de feu



On a déjà dit que si vous ne vous êtes jamais tenus près d’un pistolet tirant une balle, vous seriez choqués du bruit que cela fait. « Suffisamment bruyant pour que vous ne puissiez rien entendre pendant un moment après la détonation. » Même la manière qu’ont les cinémas d’augmenter le volume en surround pendant les scènes d’action ne traduit pas la réalité du bruit que font les armes à feu – si ce n’était pas le cas, cela endommagerait définitivement l’audition de tous les membres de l’audience. Les coups de feu sont plus bruyants que des marteaux-piqueurs – un fusil à pompe qui claque dans une pièce est plus bruyant qu’un réacteur d’avion sur le tarmac. C’est en réalité un facteur clé pour tout combat, un facteur dont aucun film n’admet l’existence.


C’est le premier indice que la Matrice est une simulation.


« Ça me rend fou quand dans les films, des gens sont dans des couloirs métalliques et échangent des coups de feu tout en parlant. Comme si tout ce qu’ils ont à faire c’est de relâcher la gâchette suffisamment longtemps pour avoir une conversation normale, » nous dit Jerry. « C’est n’importe quoi ! Les fusils sont bruyants. Les grenades sont bruyantes. L’artillerie est bruyante que s’en est ridicule. Dans le passé on n’avait pas toujours des protections pour les oreilles, alors on s’en tenait à une technique de flic : si vous n’avez pas de bouchons, les douilles de pistolet correspondent assez bien à vos conduits auditifs. »

Oh, et vous savez comment dans les films, quand les forces spéciales infiltrent un lieu en secret, elles ont ces signaux manuels cools qu’elles s’échangent pour coordonner leurs actions ?

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‘Regardes la TV. Ne vois rien.’ Compris !


Les films représentent ces signaux manuels comme la clé pour une opération nocturne furtive, mais les signaux manuels ne sont en général pas visibles de nuit. En revanche, les signaux manuels sont parfaits quand vos oreilles ont été détruites par les acouphènes :

« Ouaih, ces signaux manuels cools que vous voyez dans les films ? Ils ne servent pas à nous rendre plus furtifs pendant un assaut ou quoi que ce soit d’autre – ils sont là parce que le combat rend les gens sourds,’ nous explique Jerry.


Si votre petit camarade ne vous entend pas crier ‘putain !’, il y a un signe pour ça aussi.


« Et que Dieu vous vienne en aide quand le type à côté de vous se met à tirer, » dit Matt. « La plupart des silencieux fonctionnent en redirigeant le gaz, la pression, et le bruit vers le côté, alors si le gars à côté de vous tire, vous êtes sourd. Au final, même crier ne pèse rien face aux signaux manuels. »

C’est pour cette raison que les pertes auditives et les acouphènes sont de loin la blessure la plus courante des vétérans. Dans la vraie vie, John McClane [Bruce Willis] aurait été complètement sourd du temps de Une Journée en Enfer. Ce qui…aurait en fait pu rendre les deux opus suivants bien meilleurs !

 

# 3 Il y a des pauses bizarres pendant l’action



Une scène d’action d’Hollywood est soigneusement montée avec le souci du rythme en tête – la tension monte avec chaque balle tirée, les choses deviennent de plus en plus frénétiques jusqu’à ce que quelque chose explose en une énorme boule de feu orange. Dans un vrai combat, il y a d’étranges pauses au cours de l’action, une intermittence qui peut-être tendue, ennuyeuse, ou hilarante.

Par exemple, parfois vous êtes comme Matt, coincé dans un camion en attendant que votre boss vous dise que c’est OK de répliquer aux gars qui tirent sur votre pare-brise.

« Je patrouillais en dehors d’un village. La bonne nouvelle c’est qu’ils haïssaient les Talibans. La mauvaise nouvelle c’est qu’ils nous haïssaient aussi. Un véhicule avait été touché par 4 roquettes, et on était l’unité la plus proche à répondre. J’étais dans le véhicule largement blindé de dégagement de la route, et notre boulot consistait à nous mettre entre le camion endommagé et les éventuels méchants. Ensuite j’entends une balle qui siffle au-dessus de nous. Leur son est totalement différent  quand elles viennent vers vous. On dirait le son d’abeilles en colère.

Je m’accroupis, j’attrape mon micro et je dis : ‘2-7, ici Ranger. On me tire dessus, over.’ Et la première chose que 2-7, le chef du convoi, me demande est : ‘T’es sûr ?’ ‘T’entends ça ?’ je lui demande, ‘c’est pas le son de la pluie tombant sur ma vitre, mec.’ Je voulais tirer en réponse – je voulais vraiment tirer – mais on ne savait pas exactement où était la ligne de front, alors je ne pouvais rien faire sans risquer de toucher des innocents. Alors il y a eu une pause alors qu’on était assis là pendant plusieurs minutes à ne rien faire d’autre que de recevoir des balles. Des balles si précises qu’elles touchaient nos vitres, cherchant à atteindre mon conducteur ou moi-même. »


Alors ils sont restés là à compter les impacts de balle.


Et quand pour la dernière fois un film a-t-il montré le héros s’arrêter en plein milieu d’un échange de coups de feu pour pisser un coup ? Ces fonctions corporelles ne se mettent pas en pause simplement parce que vous tenez un fusil d’assaut entre les mains.

Jerry raconte : « Le pire pour moi a été d’être assis dans une cage d’escalier d’une maison en plâtre à deux étages au Mexique. Il n’y avait pas moyen d’accès depuis l’extérieur et les hostiles étaient au dernier étage, alors si vous n’étiez pas l’un des deux gars en tête, il n’y avait rien à faire. Et pendant que vous patientez les choses se relâchent. Vous blaguez. Vous regardez le paysage. Vous réalisez que vous deviez pisser il y a 2 heures de cela et vous ne pouvez plus tenir. »


Et parfois, vous vous rendez compte tout à coup que vous n’avez pas tenu.


Ou également, d’après Jerry, tout le monde s’arrête pour déjeuner :

« Une fois, il y avait une confrontation pendant l’assaut d’un camp, et j’ai réalisé que je n’avais pas mangé depuis le diner de la veille, alors j’ai sorti une ration. Au début tout le monde m’a regardé comme si j’étais un idiot, mais, un par un, ils ont lentement pris conscience de la même chose, alors on a tous déjeuner pendant que l’équipe échangeait des coups de feu sporadiques avec le cartel. »


« Mange ce plomb ! »
« Merci, je me contenterai de ce bœuf teriyaki. »


Et, à l’occasion, tout le monde prend le temps d’apprécier la folie absolue de tout ceci :

« On était dans un échange de coups de feu, » raconte Matt, « et c’était assez rapproché – pas plus de 50 à 75 mètres entre nous. Et alors que les balles fusaient, un âne – je blague pas, un âne – un putain d’âne galope en plein milieu du combat et se fait exploser par une roquette. Tout le monde s’est arrêté. Tout le monde – nous et les Talibans. On était tous, ‘Quoi… ? et on s’est regardé, puis on a regardé à nouveau ce qu’il restait de l’âne, puis on s’est remis à tirer. Mais pendant au moins trois secondes tout s’est arrêté. »

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