Thursday, 18 February 2016

Vladimirov – Le Bluff Soviétique dans la Course à l’Espace II

Vous pensiez que c’est Edison qui a inventé la lampe à incandescence ? Rien de tel – Yablochkov l’inventa en Russie longtemps avant Edison ? De plus, le premier aéroplane ne fut pas construit par les frères Wright mais par un ingénieur militaire russe du nom de Mozhaisky. Quid de la radio ; qui l’a inventée ? Marconi peut-être ? Pas du tout – elle a été inventée par Popov.

Les gens acceptaient sans problème l’idée selon laquelle la première locomotive fut construite par un métallurgiste de l’Altaï du nom de Polzunov.

(J’oublie de dire que le bateau à vapeur n’a pas été inventé par Fulton mais par Kulibin.) p.69-70

Et exactement un mois après son premier succès dans l’espace, le 3 novembre [1957], Koryolov lança un second Spoutnik avec la chienne Laïka à son bord. Le choc causé par ce lancement n’était pas tellement dû à Laïka elle-même (bien que le monde entier pleura pour la pauvre chienne qui avait ainsi été condamnée à mourir dans l’espace) mais au poids de ce second Spoutnik – 508,3 kg, comparé aux 83,6 kg du premier. Il semble qu’en seulement un mois l’Union Soviétique ait réussi à construire une fusée six fois plus puissante que la première. [Les passages en gras sont de mon fait. NdT]

La seconde fusée était en réalité exactement la même que la première. La seule différence était que dans la seconde l’intégralité du second étage qui devait aller en orbite fut décrite comme le ‘Spoutnik.’ En fait le second étage était aussi allé en orbite lors du premier lancement, mais il ne fut pas alors considéré comme faisant partie du Spoutnik. p.73

En 1958, une vieille usine d’avions à Moscou fut remise à Koryolov. Cette usine, située près de la station de trains biélorusse, n’était plus capable de produire des avions depuis longtemps, parce qu’elle était entouré de tous côtés par des habitations. …[Koryolov] la transforma en un centre destiné à mettre au point des méthodes pour maintenir la vie dans l’espace. Un ingénieur du nom de Voronin fut nommé à la tête de ce centre, et la tâche que Koryolov lui confia était très simple : de faire en sorte que tout soit prêt, du temps qu’il devienne possible de lancer un satellite habité d’un humain dans l’espace, pour garder cette personne en vie. Pendant pratiquement deux ans l’équipe de Voronin ne fit rien d’autre que d’étudier les publications américaines sur les patentes et sujets connexes pertinents. p.75

Sur 40 satellites lancés depuis la Terre au cours des trois premières années de « l’ère spatiale, » huit étaient soviétiques et 32 américains. Parmi les satellites américains on en trouvait beaucoup à soi-disant « longue vie, » qui étaient destinés à tourner autour de la Terre pendant 150, 300, ou même 1.000 ans [sans système de propulsion ?!? NdT]. Il n’y en avait aucun de ce type parmi les huit satellites soviétiques. Le premier Spoutnik soviétique à longue vie (devant rester en orbite 200 ans) ne fut pas lancé avant 1964, longtemps après les premiers vols habités. On aurait pu penser que les différents accomplissements étaient tranchés. Cependant, l’illusion du leadership soviétique dans l’espace continua à être acceptée comme si rien ne s’était produit. L’illusion fut maintenue grâce à la même méthode éprouvée : les Russes continuaient à anticiper chaque défi annoncée à l’avance par les Américains. [Comme c’est pratique – et gentil de leur part !! NdT].

En 1958 par exemple, les Américains annoncèrent leur intention de lancer Pioneer 4 en orbite héliocentrique. La mission fut un succès – Pioneer fut lancée le 3 mars 1959. Mais les Américains n’acquirent pas le leadership spatial pour autant, parce que deux mois auparavant, en janvier 1959, la sonde Luna I soviétique fut mise en orbite héliocentrique. Il ne semble pas peser dans la balance que Pioneer ait transmis beaucoup plus d’informations télémétriques intéressantes, alors que Luna I ne transmit presque rien du tout ; le fait d’avoir été les premiers à effectuer un tel lancement semblait être beaucoup plus important. p.76-77

[Koryolov] décida que le pilote de la capsule spatiale devrait se catapulter hors de la cabine avant que celle-ci atterrisse au sol et finirait ainsi sa descente avec son propre parachute. [La capsule était trop lourde pour être freinée par des parachutes seuls, NdT.] p.82

Les essais [pour le premier vol habité] furent organisés en sorte de simuler les conditions d’un vol spatial réel. À une altitude d’environ 10.000 m, une capsule hermétiquement fermée fut larguée d’un avion-cargo militaire. À l’intérieur se trouvait un parachutiste habillé exactement comme le futur cosmonaute. Après une chute libre de 3.000 m, la capsule atteignait en gros la même vitesse verticale que celle d’une véritable capsule spatiale en ré-entrée. À une altitude de 7.000 m les écrous fermant l’écoutille sautaient automatiquement. Une seconde plus tard un système de catapulte entrait en jeu et éjectait le parachutiste avec son siège. Ensuite un petit parachute de traîne s’ouvrait, suivi par un plus gros, stabilisateur, et à une altitude d’environ 4 km le parachute principal s’ouvrait en même temps que le siège se détachait du parachutiste, celui-ci terminant sa course de la manière habituelle. [C’est ce qui a été fait pour simuler les ‘vrais’ vols spatiaux de Gagarin et autres. NdT] p.89

Kroshkin [~chef de la propagande pour les affaires spatiales] avait reçu des instructions pour ne pas révéler lors de la conférence de presse le fait que Gagarin avait atterri séparément de la capsule à l’aide d’un parachute. p.105

…quelques jours plus tard il devint clair pourquoi Khrouchtchev avait été si pressé d’organiser le lancement.

Cette fois la raison était inattendue : Khrouchtchev avait eu besoin d’un bon feu d’artifices pour détourner l’attention de l’opinion publique mondiale du Mur de Berlin, qui fut construit le 13 août 1961. Et il faut dire que dans une certaine mesure, il a atteint son but. Les occidentaux dirent : « Il est bien entendu terrible qu’ils aient construit un mur de prison à travers Berlin, mais d’un autre côté ils ont bien réussi leur vol spatiale – réussir à maintenir un homme dans l’espace 24 h…grands dieux ! » p.110

[Dans le chapitre suivant, Vladimirov raconte l’épopée des Voskhod I et II [en fait identiques aux Vostok précédents], lancés en urgence pour couper l’herbe sous les pieds des Américains. La 1ère mission devait lancer trois hommes dans l’espace – les Américains venaient d’annoncer qu’ils allaient en mettre deux – et la 2ème consistait en une sortie spatiale de quelques minutes.

Concernant Voskhod I, les Russes s’arrachèrent les cheveux pour réduire au maximum le poids de la capsule. Ils enlevèrent la plupart des instruments électroniques, et les cosmonautes voyagèrent dans l’espace…en slip ! Les tenues spatiales prenaient trop de place dans la petite capsule [originellement prévue pour une seule personne] et ajoutaient trop de poids au décollage. Les Russes comptaient sur l’étanchéité de la capsule pour leur survie !! Si cela vous semble absurde, c’est que vous n’êtes pas mort ! De plus, comme le système d’éjection de la capsule afin de terminer la descente en parachute ne pouvait pas s’appliquer aux trois cosmonautes – l’écoutille étant trop petite – les Russes réussirent à accomplir un atterrissage en douceur de la capsule entière. Comment cet exploit a pu être réalisé alors que celle-ci ne pesait pas moins que les capsules précédentes n’est pas expliqué. Un miracle soviétique de plus, probablement. NdT]

[Concernant Voskhod II :]

On savait que lors du premier vol habité Gemini, les astronautes américains devaient ouvrir l’écoutille et dépressuriser leur cockpit, après quoi ils devaient le fermer à nouveau et le re-pressuriser. Lord du second vol Gemini, peu après le premier, il était prévu que l’un des astronautes effectue une sortie dans l’espace. C’était ce programme des Américains, annoncé à l’avance comme d’habitude, que Koryolov se proposa de devancer…

On suivit le conseil de Voskrensensky de ne pas dépressuriser la capsule en vol. À la place, une idée plus simple fut adoptée : un tube léger fut adapté à l’écoutille de la capsule pour créer un sas dans lequel le cosmonaute devait ramper avant d’ouvrir l’écoutille extérieure, ce qu’il devait faire après que le second cosmonaute eut fermé l’écoutille intérieure derrière lui. La ré-entrée dans la capsule fut accomplie en inversant le procédé. p.140

[Comment le tube « léger » qui devait bien faire 1,8 m de long est-il rentré déjà fixé dans la fusée Voskhod (vu que les cosmonautes ne pouvaient pas l’installer une fois en orbite) ? Comment a-t-il résisté aux vitesses fulgurantes de la capsule ? Autant de questions sans réponse logique…NdT]

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