Tuesday, 18 July 2017

Les véritables causes de la Grande Dépression VI

1930 - II


La loi S-H de 1930 fut mise en place dans une période où la tendance était déjà à la baisse. A l'évidence, le déclin - après la hausse de 1928 - du surplus commercial fut aidé par ces nouvelles taxes et se fit encore plus prononcé jusqu'en 1933. Mais le déclin fut tout aussi net pour les biens produits et vendus domestiquement. Si on regarde le graphique des taxes douanières, on ne voit pas de corrélation directe entre hausse des tarifs et dépression dans celles qui ont précédé les années 1930. Pourtant les politiques préfèrent pointer du doigt le protectionnisme comme la seule leçon à retenir de la GD. Ils ne pensent pas à regarder les hausses exorbitantes d'impôts, les manipulations et interventions [de la Fed] sur le marché des devises. Peut-être que si l'Europe n'avait pas surévalué ses monnaies post-1ère GM et avait accepté l'évaluation du marché l'intervention de 1927 n'aurait pas été nécessaire, et la guerre commerciale aurait pu être évitée. Mais l'insistence de Montagu Norman, gouverneur de la Banque d'Angleterre, à vouloir faire revenir le pound a sa valeur d'avant-guerre, à maintenir les exportations britanniques élevées tant en $ qu'en FF, mit les événements en marche. La France en revanche, poussée par son aversion historique pour la G-B, dévalua le FF et le maintint sous-évalué à dessein pour promouvoir ses exportations. Par conséquent la France accumula plus d'or que la G-B tout en imposant des restrictions aux importations étrangères. La France fut de loin le pays le + agressif dans la tendance protectionniste envahissant l'Europe. p.269



Penser que seuls les tarifs douaniers furent la cause de la GD est largement erroné. Cette contraction économique qui toucha le monde entier fut principalement le fait de la destruction de la confiance du public dans l'économie en plus d'une crise de la dette cachée derrière tous les rapports de presse et les statistiques économiques. Mais les banques centrales voyaient le surplus de la balance commercial US et le statut de pays créditeur des USA comme empêchant la reconstruction de l'Europe. Les banquiers non-américains expliquaient qu'à moins que les taux US ne baissent et que les échanges penchent à nouveau en faveur de l'Europe, le remboursement des emprunts de guerre accordés par les USA ne se ferait jamais. Le véritable problème était que l'économie US avait crû via l'innovation et la dévastation de l'Europe pendant la guerre. Mais les exportations US commencèrent à baisser dès 1925, pas en 1929 ou 1930. La capacité de l'Europe à acheter était fortement restreinte par son gigantesque service de la dette de guerre ainsi que sa politique de réarmement. De plus, les mesures prises pour intervenir en faisant baisser les taux US dans l'espoir d'attirer l'argent vers l'Europe n'auraient pas dû être prises. Ce qui aurait dû avoir lieu était une dévaluation des monnaies européennes correspondant à la capacité de croissance économique réduite dans les différents pays. p.270

Analysées objectivement, les données économiques pointent vers l'existence d'un déclin général des échanges commerciaux mondiaux déjà en place au dernier trimestre de 1929. Le protectionnisme fut mis en place en réaction à ce déclin ainsi qu'aux monopoles industriels européens qui représentaient une concurrence injuste pour les USA [loi Sherman d'interdiction des monopoles]. Si le déclin n'avait pas déjà été là, de nouvelles taxes douanières n'auraient pas été appuyées comme elles le furent. Ayant cela en tête, on ne peut blâmer la dépression sur la seule loi S-H, bien que les années 1920-1930 furent une période d'intense guerre commercial au plan international. p.271

La plupart de la faute revient véritablement aux banques centrales et leurs tentatives politiques de renforcer les monnaies européennes à des niveaux trop élevés vu leur capacité réduite à participer à l'économie mondiale après la guerre. Celle-ci avait dévasté leurs positions économiques, fait qui n'était pas reflété dans la valeur de leurs monnaies respectives sur les marchés des changes. p.272

L'intervention des banques centrales en 1927 fut nécessaire pour déplacer les capitaux vers l'Europe afin de maintenir leurs monnaies à des niveaux artificiellement élevés. Ce fut l'une des principales causes de la GD. Cette intervention eut pour conséquence une fuite des capitaux des obligations vers les actions.
Déplacement des capitaux des obligations vers les actions

Alors que les prix montaient, les spéculateurs et les novices furent attirés vers ces marchés pour réaliser de rapides profits. Cela n'aurait pas eu lieu si les monnaies européennes n'avaient pas été si surévaluées. Les marchés européens atteignirent leurs + hauts respectifs peu après, et le capital de ces marchés-là afflua alors vers le marché US. Nombre d'Européens intelligents étaient arrivés à la conclusion de Falk: les investissements en $ étaient sous-évalués. p.273
Obligations

L'info qui brisa le marché concernait des banques. Lors des 6 premiers mois de 1930, 471 banques firent faillite, emportant avec elles 210 M$ d'actifs. 62 étaient membres du Système de la Réserve Fédérale. La plupart étaient de petites banques indépendantes souffrant de la baisse des prêts adossés à l'immobilier et aux matières premières. p.292


Le chômage ne s'en allait pas. Le 9 septembre 1930, le Président Hoover limita l'immigration aux USA. Seuls les touristes, étudiants, et hommes et femmes d'affaires étaient autorisés à entrer dans le pays. p.293

En novembre le marché continua à baisser alors que 64 banques en Arkansas firent faillite ou fermèrent pendant 5 j. Au Kentucky, 15 des 579 banques firent faillite. La plupart des faillites étaient liées au prix en baisse des matières premières...
A compter de décembre, on enregistra 981 faillites bancaires sur les 11 premiers mois de 1930. La plupart se trouvaient dans le Midwest, frappé par la sécheresse [Dust Bowl]. p.294

Dans le Bronx, à NY, un petit commerçant alla à la branche de la Bank of the United States et demanda à des responsables s'ils lui rachèteraient ses actions de ladite banque. Ils lui répondirent qu'il devrait garder ses actions, les considérant comme un bon investissement. Le commerçant comprit mal ce qu'on lui dit et l'interpréta comme un refus de rachat de la part de la banque.
L'après-midi, il avait répété à tout le monde et son cousin que la banque refusait de lui racheter ses actions et que qqch devait aller mal. Ajouté aux annonces de faillites dans le Midwest, il ne fallut pas longtemps aux habitants du Bronx de croire que la BotUS allait suivre le même chemin. Une panique modérée démarra cet après-midi et la police fut appelée. La mauvaise nouvelle se répandit comme une traînée de poudre à toutes les branches de la banque. Toujours le même après-midi, une réunion d'urgence de tous les principaux banquiers new-yorkais fut organisée au 10ème étage de la Fed...

La presse européenne enflamma la situation en jouant sur la confusion 'Bank of the US' (une banque 100% privée) et 'Bank of England' (banque centrale de G-B)...

Si le commerçant avait pu vendre ses actions le jour où il lança involontairement cette panique, il aurait obtenu ~11,50$ par action. A la clôture le même jour, il n'aurait obtenu que 3$. Au sommet de la bulle de 1929, les actions de la BotUS s'échangeaient à 240$. p.294-295

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