1931 - I
Time Magazine relata en janvier le récit tragique d'un dénommé Robert German, ouvrier de l'acier à Berlin. Après avoir fini sa rotation de lendemain de Noël, Mr German rentra chez lui et mit son plus beau costume et son haut-de-forme. Il repartit pour l'aciérie et discuta avec le contremaître à côté d'une cuve de fer en fusion à une température de 2.862ºC. Après une brève conversation, Robert German plongea tout d'un coup la tête la première dans la cuve. Le contremaître arrêta immédiatement le fourneau et organisa une recherche sans succès. Plus une trace n'existait de son ami. p.296
Un autre bouc-émissaire fut le fameux Charles Ponzi, créateur du 'Ponzi scheme' ou 'escroquerie pyramidale' [pour lequel il avait été arrêté en 1920]. Début 1931, les "investisseurs" avaient touché leur chèque représentant 0,5% de leur participation avant son arrestation en 1920. Ponzi était surnommé un 'dupeur extraordinaire' et un 'maître de la personnification et de l'argent facile.' p.297
A travers mes recherches sur les booms et paniques économiques, un facteur sous-jacent a toujours joué un rôle déterminant. C'est le niveau de confiance. Des conditions financières malsaines entourant la valeur du $ avaient amené à une crise de confiance. Les capitaux étaient accumulés par les entrepreneurs chaque fois que la confiance en l'économie était remise en question. Cette même observation fut faite par Marx dans les années 1800. Il nota que lors de certaines périodes où la confiance disparaissait les riches capitalistes avaient peur d'investir et finissaient par ne rien faire de leurs fonds. Il supposa qu'ils causaient ainsi une contraction des investissements productifs. La solution selon lui était alors simple: retirez le capital de ces gens-là et vous n'aurez plus de crise de confiance! Selon son raisonnement, il s'en suivait que les dépressions pouvaient être éliminées.
Dans l'ère de post-dépression, ce fut Keynes qui allait fournir une lueur d'espoir. Il imaginait que les gouvernements pouvaient empêcher les dépressions en augmentant leurs dépenses pour compenser la contraction des investissments dû à la perte de confiance.
Ni l'une ni l'autre de ces idées ne semblent avoir solutionné le problème. L'idée de Marx était d'éliminer les peurs humaines qui menaient à la perte de confiance. La solution ultime serait alors d'éliminer l'homme lui-même et cela mettrait fin à l'avarice, la spéculation, et la contraction de la confiance lançant ces cycles. Keynes ne fit qu'ajouter un nouveau joueur n'ayant pas la sagesse de manipuler la situation. Les politiciens votent des dépenses supplémentaires uniquement pour garder leur boulot plutôt que de restreindre ces dépense quand c'est dans l'intérêt de la nation. C'est la nature de ces événements. L'instinct de survie est la force dominante chez les politiques autant que chez les capitalistes. Les deux se sont jetés la faute pour la défense de leurs intérêts. Mais si les individus n'agissaient pas dans leur intérêt, peut-être n'y aurait-il rien pour lequel survivre.
p.300-301
Les forces cycliques qui semblent diriger les cycles économiques sont au moins en partie créées par les forces cycliques de la Nature. C'est la Nature qui dicte les cycles des matières premières, les faisant alterner entre famine et festin. Dans nombre de cas, le destin financier de l'Homme a été changé ou guidé par la Nature, y compris des événements tels que le tremblement de terre à Chicago en 1907. La Nature joue un rôle dans les cycles économiques, contribuant à la montée de l'inflation dans le domaine de la nourriture lors des sécheresses, ainsi que la déflation suivant une surproduction - comme à cette période. Il est logique que les gouvernements ne puissent prévoir de tels événements ni intervenir efficacement. D'une certaine manière, l'homme a toujours été à la merci de la Nature. p.301;304
Les faillites bancaires se répandaient dans l'est du pays, ne se limitant plus aux secteurs liés aux matières premières. A Gary, Indiana, la Central Trust & Savings Bank ferma en janvier 1931, faisant perdre 1 M$ de dépôts. p.306
Faillites commerciales
Alors que la dépression empirait, l'immobilier devint extrêmement illiquide. Les actions au moins pouvaient être échangées à la bourse. Mais les obligations adossées à de l'immobilier firent simplement défaut, emportant avec elles les économies de petits investisseurs. p.306
Prix des Obligations
Nombre de banquiers étaient opposés à des tarifs douaniers élevés en dépit du fait que dans nombre de cas ils étaient justifiés, vu que beaucoup de pays en imposaient des bien plus élevés que les USA. Les banquiers s'inquiétaient du remboursement des prêts aux pays étrangers. La guerre commerciale faisant rage, ces derniers étaient incapables de gagner suffisamment de $ pour payers leurs emprunts en cours. Il est vrai que la situation avait toujours été ainsi. Le fait était simplement occulté par le montant énorme des émissions obligataires étrangères réalisées post-1ère GM. Par conséquent, les banquiers pensaient que le gouvernement devait annuler ses prêts aux pays étrangers afin que ceux-ci puisse rembourser leurs emprunts en cours détenus par les banques.
...
La guerre commerciale faisant baisser le volume des échanges internationaux, les pays étrangers étaient incapables de rembourser leurs emprunts. En réalité, l'extension de crédits dans les années 1920 ne fut pas la solution. Dans le cas de la Grande-Bretagne, son problème était la surévaluation de la livre pour laquelle Montagu Norman, président de la Banque d'Angleterre, avait voulu qu'elle retrouve son niveau d'avant-guerre. Cela ne pouvait arriver sans créer une déflation massive et une croissance économique faible. C'est donc la mauvaise gestion par les gouvernements du monde entier qui fut l'un des principaux facteurs de la GD des années 1930. p.307
Alors que 1930 touchait à sa fin, la Fed abaissa son taux directeur pour la 7ème fois depuis le krach de 1929. En janvier ce taux affichait 2%, un + bas historique. Mais les actions de la Fed ne provoquèrent aucune remontée spectaculaire des marchés. La plupart des traders restèrent prudents. Les obligations en revanche remontèrent fortement, de moins de 93 à mi-95. p.308
Taux directeur de la Fed de NY
On aurait pu penser qu'avec des taux à 2%, des obligations rapportant 7% se seraient échangées bien au-dessus de la parité. Mais la réalité était très différente. Le sentiment de sécurité associé au marché obligataire était bien pire que celui du marché action. p.314
En dépit du fait que les taux étaient en baisse, les banques ne prêtaient pas aux individus. Les prêts personnels n'étaient pas une pratique courante au sein des banques. Un tel prêt nécessitait la signature d'un ami et autant de gages que possible, si ce n'est 150% du montant du prêt. Cela donna naissance aux business de prêts personnels, prêteurs sur gages et autres "usuriers" tels qu'on les appelait. Le quidam moyen voulant emprunter de l'argent devait payer jusqu'à 42% par an! Les taux en baisse n'aidèrent vraiment pas ce segment de la société. p.325
TAUX D'INTÉRÊT ANNUEL EXIGÉ
Bas Haut
Life Insurance Co. 6% 6%
Building & Loan Soc 6% 12%
Credit Union 6% 18%
Commercial Banks
(personal loan dept) 9% 22%
Installment Finance Co. 16% 25%
Industrial Banks 17% 34%
Remedial Loan Soc 12% 36%
Personal Finance Co. 30% 42%
Pawnbrokers 12% 120%
Salary Buyers* 120% 480%
[*Vous prête un peu moins que votre salaire, par exemple 45$ pour un salaire hebdo de 50$, et perçoit votre chèque à la fin de la semaine.] p.327
En dépit de l'effet négatif sur la compétitivité US à l'international et des difficultés croissantes de l'industrie US, le gvt adhéra résolument aux lois Sherman sur les monopoles [empêchant leur création aux USA, alors qu'ils étaient autorisés en Europe] sous prétexte d'aider les consommateurs. De plusieurs façons, ce sont ces lois mêmes qui firent naître le besoin de la Loi Smoot-Hawley sur les Tarifs Douanières de 1930 qui, à son tour, ne fit qu'empirer la guerre commerciale mondiale. p.333
En étudiant les bénéfices du 1er trimestre 1931, j'ai trouvé que dans l'ensemble - peu importe la taille des entreprises et sans un quelconque pro rata - l'industrie automobile, un temps majestueuse, nota un déclin de 271% dans ce 1er trimestre. L'industrie électrique croissante, une baisse de 93,5%. Deux des industries les moins affectées furent les éditeurs, -30,6%, et l'agri-business (ceux qui transofrment la nourriture, pas les producteurs agricoles eux-mêmes), -15,5%.
Il est ironique que lorsque le marché a montré les premiers signes de troubles en 1929, beaucoup blâmèrent les pronostiques "optimistes" des capitaines d'industrie et des politiques. Si cela était vrai, toutes les annonces optimistes du début 1930 ainsi qu'en janvier-février 1931 auraient dû mener à une hausse des marchés. Au final, ces annonces n'eurent aucun effet. Le public juge une situation sur ce qu'il voit, PAS ce qu'il entend. Tout le monde pariait sur une hausse en 1929 en fonction des prix sans cesse croissants des actions courantes, PAS à cause des paroles de Hoover ou de qui que ce soit d'autre. p.334-335
Bénéfices des entreprises aux 1ers trimestres 1930 et 1931 (K$), et % de variation
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